« Mon travail tient en ceci : trouver les moyens de rendre à cette prose tout le registre des émotions qu’elle inspire ».
Voici comment Marcel Bozonnet nous parle dans sa courte note d’intention. Né d’abord comme accompagnement d’un projet musical de l’ensemble Gradiva, pour “illustrer” des morceaux d’Antoine Bosset (musicien à la cour de Louis XIII), le texte de “La Princesse de Clèves” a fini par supplanter la musique du récital jusqu’à en devenir le corps du spectacle. Dans cette nouvelle reprise du spectacle qu’il joue depuis 1995 sur toutes les scènes du monde ne reste que le texte… Et Marcel un peu plus vieux !
Il est de ces acteurs qui s’attaquent seul à Montaigne sur de petites scènes intimistes. Il en est d’autres qui s’attaquent au roman psychologique de Madame de La Fayette, roman hors du commun s’il en est, et sur une grande scène vide. Un pari que Marcel Bozonnet relève avec un naturel feint qui cache à coup sûr de nombreuses heures de travail et de nombreuses années d’exercice pour s’approprier et faire résonner toujours aussi haut et clair les belles sonorités de l’imparfait du subjonctif de sa “chère langue du XVIIe”.
Très apprêté dans un costume Henri II légèrement cocasse pour l’œil contemporain, Marcel Bozonnet livre pendant 1h20 de monologue l’histoire de la passion contenue de cette Madame de Clèves. Prenant vie dans sa bouche de conteur, qui suggère plus qu’il n’incarne par quelques modulations de sa voix et une gestuelle aérienne et délicate, les divers protagonistes nous émeuvent. Courtoisie rappelant presque Les Lais de Marie de France, heures fastueuses des tournois et des chasses à courre s’animent dans nos esprits à la simple évocation du conteur…
Un moment de rêverie et une belle performance d’acteur-conteur !