Cette pièce est une belle réussite : Geneviève Casile y incarne une Alma Mahler pleine de classe, de sarcasme et de sensibilité. Pour être honnête, mal interprété, son personnage aurait pu être quelque peu désagréable : seules les grandes actrices peuvent jouer les vieilles pimbêches et ne rien perdre de la sympathie de leur public!
Car Alma Mahler est une femme de la vieille école, grande dame ayant selon elle-même tout vu, tout vécu… Et se comportant de façon désobligeante et supérieure avec son éditeur, venu chez elle pour qu’ils relisent ensemble ses mémoires avant publication. Elle lui lancera quelques piques mais au fil de la pièce, la veuve des Quat’z’ arts va révéler peu à peu ses fêlures, se transformant en une créature pleine de grâce.
C’est dans cette palette de jeu, dans cette finesse d’interprétation que Geneviève Casile resplendit. L’actrice qui joue Alma jeune, Julie Judd n’est d’ailleurs pas en reste. Les deux femmes se ressemblent et semblent liées- leurs interprétations du même personnage à différentes époques et avec les différents hommes ayant bouleversé le cours de la vie d’Alma s’accordent parfaitement, rajoutant de la beauté à cette pièce bien écrite. Stéphane Valensi leur donne la réplique, figure protéiforme se glissant à tour de rôle dans la peau de Klimt, Mahler, Kokoscha Gropius, Werfel et incarnant ainsi toutes ces figures de l’art dont Alma tombera amoureuse.
Je suis donc ressortie conquise : bien des pièces contemporaines offrant un nom comme tête d’affiche sont décevantes. Mais pas celle-ci : l’écriture et le jeu se nourrissent pour créer quelque chose de grand, un beau moment de théâtre.
Photo: portrait d’Alma par Kokoschka avec la belle affiche de la pièce