Une salle, un jeu de lumière, une présence et le feu de la poésie.
C’est la deuxième fois que je me prête au jeu avec Jean-Baptiste Ponsot, avec qui j’avais découvert en 2015, complètement subjuguée, le texte «Ecce Deus» de Victor Hugo. Cette fois-ci, dans le même exercice de déclamation et d’apartés explicatifs, l’acteur longiligne à la voix grave et profonde nous invite à la poésie. En passant par le feu de la chute (Baudelaire), de l’impossible (Rimbaud), du drame (Hugo), puis par le feu de la création (Nietzsche) pour atterrir dans celui de la célébration (Whitman), Jean-Baptiste Ponsot nous captive de bout en bout.
Il est porteur de sens et l’on croise avec lui les Etonnants Voyageurs, les peaux rouges, le cynisme nietzschéen, et l’infini de Whitman. Cinq univers de transcendance, d’absolu et de génie créateur. Selon les sensibilités, on aimera pas forcément tous les passages : Hugo n’est pas Baudelaire et encore moins Whitman mais on boit avec plaisir les paroles de l’interprète qui y met tout son corps pour faire vivre le rythme des textes. Car Jean-Baptiste fait de la poésie une expérience concrète en incarnant ces poèmes avec son corps, sa gestuelle. De plus, la limite entre ses propres paroles et les paroles des poètes est si fine que sans que le ton change, sans qu’on s’en aperçoive, il nous a déjà embarqué dans un nouvel univers.
Le spectacle est long juste ce qu’il faut et fait un bien fou: j’ai pour la première fois compris ce que les « fleurs du mal » voulait dire (trouver de l’éternel dans le transitoire, du néant sortir le beau, ainsi cueillir « les fleurs » – « du mal »), j’ai écouté jusqu’au bout « Le bateau ivre » de Rimbaud que je n’avais jamais réussi à lire en entier, j’ai découvert un sublime texte d’Hugo et tenté de saisir Nietzche et Whitman. Mon écoute et celle des autres spectateurs était palpable, le comédien nous remercie même de la beauté du moment-moment captivant.
Ce spectacle est un cadeau et Jean-Baptiste Ponsot un bienfaiteur : avec ses mises en scènes, il fait jaillir de sa voix la beauté de la langue et du verbe. C’est un songe éveillé, partagé par de sages rêveurs- la catharsis n’est pas loin !
Le feu du poète, de la chute à la célébration
Création, mise en scène et interprétation par Jean-Baptiste Ponsot
Poèmes de Baudelaire, Rimbaud, Hugo, Nietzsche et Whitman
Encore deux représentations au Studio Hébertot – 78 bis boulevard des Batignolles – 75017 Paris