Le souper fait partie de ces pièces que la plupart des spectateurs viennent voir pour regarder jouer des acteurs, s’enivrer de leur talent. Dans la veine des duos formés dans: Voltaire Rousseau (Théâtre de Poche), Inconnu à cette adresse (Théâtre Antoine) ou Diplomatie (théâtre de la Madeleine), le Souper propose un face à face entre Niels Arestup et Patrick Chesnais.
L’intrigue, qui reste sans conteste le premier élément d’une représentation réussie, se situe en 1815 : Fouché et Talleyrand, deux monstres politiques s’affrontent dans un huis clos nocturne pour décider de qui prendra la tête de la France après la défaite de Waterloo et l’exil de Napoléon. Bien malheureusement, on est déçu de ne pas assister à la joute verbale qu’on était venu voir.
En effet, une très nette différence de diction et de niveau sonore entre les deux acteurs vient déséquilibrer la pièce jusqu’à en impacter l’intrigue. Là où on s’attend à ce que les deux protagonistes soient aussi habiles l’un que l’autre à convaincre le parti adverse, N. Arestup surplombe. Son personnage a beau s’accouder à sa canne, il reste inébranlable d’assurance. En revanche, Patrick Chesnais paraît plus chétif et son personnage plus coléreux donne l’impression de jouer des coudes et de s’épuiser dans le vin que son adversaire n’a de cesse de lui resservir. Vient alors ce constat : soit ce déséquilibre est voulu, anticipé, et dans ce cas le résumé de la pièce est quelque peu dissonant/trompeur soit le “ténor” Chesnais peine réellement à faire contrepoids au “baryton” Arestup et dans ce cas, le choix de ce duo ne crée pas l’étincelle qui nous ferait balancer d’un « bon moment » à quelque chose de plus mémorable… Comme dans Diplomatie où la puissance du texte et l’alchimie entre N. Arestup et A. Dussolier avaient valu à la pièce d’être adaptée au cinéma !
On passe donc un agréable moment tout en restant sur sa faim car ce n’était pas la pièce à laquelle notre imagination nous avait préparé-on est pas prêt à souper au cinéma!
– Bénédicte Six.