Saudade d’ici et là-bas – Théâtre des 3S

« On ne peut pas s’accrocher à des murs ».

« Saudade d’ici et là-bas » parle des racines, de l’espoir et des aspirations qui forcent certains à s’arracher de la terre natale. « Saudade d’ici et là-bas » parle aussi de la double culture et de la difficulté de transmission de celle-ci de génération en génération. Pour les deux adultes Joana et Idalio, partis vivre avec leurs parents en France et devenus modèles d’intégration, la Saudade fait écho à leur héritage culturel et leur enfance ensoleillée. Des moments heureux. Pour le jeune Manu, il s’agit d’un autre temps qui ne le concerne pas.

Les trois comédiens sont charismatiques avec chacun une identité propre : ténébreux est Dan Inger Dos Santos, espiègle Simon Quintana, modèle de courage Isabel Ribeiro. Leur interprétation des chansons traditionnelles est très sensible et belle. Le Portugal cultive un esthétisme de la mélancolie et de la nostalgie qui n’est pas dépourvu de charme ; et l’alchimie de ce trio de comédiens-musiciens-chanteurs qui nous transmettent ce chant de la Saudade se ressent au plateau.

La mise en scène d’Alexis Desseaux crée de la fluidité entre les passages chantés et les scènes du passé et du présent. L’usage de la vidéo sert sobrement la dramaturgie et nous fait voyager. Cependant, j’aurais aimé que la pièce s’attarde un peu plus sur cette famille de luso-descendants dont les parents se sont exilés en France pour obtenir une meilleure vie et jamais vraiment revenus. Confrontés au dilemme de laisser filer leur passé en vendant la maison familiale, ils se trouvent paradoxalement réunis pour l’occasion sur deux générations. J’aurais aimé les suivre plus longtemps dans ce moment de choix crucial, dont l’issue n’est d’ailleurs pour moi pas certaine…

Ce spectacle musical aborde un sujet qui nous touche tous un jour dans une certaine mesure : que faire d’un bien dont on hérite ? Le garder pour le moment de vie qu’il représente ou bien s’en détacher ? Au-delà de l’exil, qui nourrit ici le sentiment tout particulier de la saudade, la question universelle de la transmission ne peut que nous toucher.

 

Crédit photo : David Rito
Rédaction article : Bénédicte Six

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *